Sortie en capital d’un PER : que prévoit l’article 8 sur la fiscalité ?
Lorsque l’on prépare sa retraite avec un Plan Épargne Retraite (PER), on pense souvent à l’effort d’épargne, aux supports financiers ou encore à la rentabilité. Mais une autre question cruciale se pose au moment de la retraite : comment sera fiscalisée la sortie de mon épargne ? Et en particulier, si je choisis une sortie en capital, que dit exactement la loi, notamment l’article 8 de la loi Pacte ?
Dans cet article, je vous propose une analyse claire et accessible des règles fiscales applicables à la sortie en capital d’un PER, en s’appuyant sur l’article 8, mais aussi sur le contexte réglementaire plus large. Vous verrez que comprendre ces mécanismes peut vous aider à optimiser votre fiscalité et à faire des choix éclairés pour votre avenir.
PER : rappel du fonctionnement et des options de sortie
Le Plan Épargne Retraite, instauré par la loi Pacte de 2019, vise à simplifier et harmoniser les dispositifs d’épargne retraite. Il remplace notamment le PERP, le Madelin, et les contrats Article 83.
À la retraite, le PER peut être liquidé de plusieurs façons :
- En rente viagère
- En capital versé en une ou plusieurs fois
- En combinaison des deux (rente + capital)
C’est la sortie en capital qui retient notre attention aujourd’hui. Elle séduit par sa flexibilité, mais elle peut avoir des conséquences fiscales non négligeables. C’est là que l’article 8 intervient.
Ce que prévoit l’article 8 : uniformité des règles fiscales
L’article 8 de la loi Pacte a refondu la fiscalité des produits d’épargne retraite, notamment en ce qui concerne la sortie en capital. L’objectif ? Uniformiser et clarifier les règles, car auparavant, chaque vieux produit avait sa propre fiscalité (un vrai casse-tête).
Désormais, la fiscalité dépend de l’origine des versements effectués sur le PER :
- Versements volontaires déduits de l’impôt
- Versements volontaires non déduits
- Versements issus de l’épargne salariale (intéressement, participation, abondement, CET)
- Versements obligatoires de type article 83 (anciens contrats transférés dans un PER)
- Le capital (les sommes versées) est imposable au barème de l’impôt sur le revenu
- Les gains (intérêts produits) sont taxés au PFU (Prélèvement Forfaitaire Unique) de 30 %, sauf option pour l’imposition au barème
- Le capital récupéré est exonéré d’impôt
- Seuls les gains sont soumis au PFU de 30 %
- Le capital est exonéré d’impôt sur le revenu
- Les plus-values sont soumises uniquement aux prélèvements sociaux (17,2 %)
Chaque type de versement suit des règles fiscales distinctes lors de la sortie en capital.
Comment est fiscalisée la sortie en capital selon l’origine de l’épargne ?
1. Versements volontaires déduits
Si vous avez déduit ces versements de votre revenu imposable, vous bénéficiez d’une économie d’impôt à l’entrée. En contrepartie, la sortie en capital est imposable.
Exemple : si vous percevez 60 000 € dont 50 000 € de versements déduits et 10 000 € d’intérêts, les 50 000 € iront dans votre revenu, et les 10 000 € subiront 30 % d’imposition (12,8 % + 17,2 % de prélèvements sociaux), soit 3 000 € de fiscalité.
2. Versements volontaires non déduits
Ici, vous n’avez pas bénéficié de déduction à l’entrée, donc la fiscalité est plus douce à la sortie :
C’est souvent la stratégie favorisée par ceux ayant une tranche marginale d’imposition élevée, ou souhaitant lisser leur fiscalité sur le long terme.
3. Épargne salariale (intéressement, participation, etc.)
Bonne nouvelle : pour les sommes issues de dispositifs d’épargne salariale, la fiscalité est simplifiée :
Autrement dit, sortir un plan boosté par votre entreprise peut être très avantageux fiscalement. Une stratégie souvent sous-estimée !
4. Versements obligatoires (article 83)
Si vous avez transféré un ancien contrat « article 83 » sur votre PER, les modalités sont particulières. L’article 8 a prévu que la sortie en capital est interdite pour ces sommes. Vous ne pourrez les sortir qu’en rente viagère.
C’est un point souvent méconnu, mais crucial : tous les compartiments de votre PER ne sont pas égaux en termes de flexibilité à la sortie.
Impact de la sortie en capital sur votre imposition
Le véritable nœud stratégique dans la sortie en capital, c’est la gestion de votre revenu imposable l’année de sortie. Pourquoi ? Parce que les versements déduits sont réintégrés à votre revenu global.
Résultat : si vous sortez une grosse somme d’un coup, vous risquez un effet de seuil fiscal. Votre taux marginal d’imposition (TMI) peut augmenter temporairement et faire s’envoler la note.
Exemple : Paul, retraité avec 25 000 € de revenu annuel, récupère 70 000 € de capital issu de versements déduits. Son revenu imposable grimpe à 95 000 € cette année-là… Bonjour la tranche à 30 % ou plus !
Une astuce ? Opter pour un versement échelonné sur plusieurs années pour lisser la fiscalité. La souplesse du PER permet des retraits programmés, à ajuster selon vos besoins et votre imposition.
La sortie en capital est-elle toujours la bonne stratégie ?
Pas forcément. Elle séduit par son côté « cash immédiat », mais elle nécessite une bonne préparation en amont. Voici quelques points à évaluer avant de trancher :
- Vos besoins de trésorerie immédiate
- Votre taux marginal d’imposition à la retraite
- Vos autres ressources : pensions, revenus locatifs, dividendes, etc.
- Votre situation patrimoniale : succession, investissement, démembrement
Dans certains cas, une rente viagère sera plus favorable (revenu régulier, fiscalité avantageuse sur la part rente), surtout si vous vivez longtemps ! Dans d’autres, le capital permet d’anticiper un projet (achat immobilier, donation, voyage, etc.).
Des pièges à éviter pour ne pas payer trop d’impôts
Voici quelques écueils courants à anticiper :
- Effectuer uniquement des versements déduits sans anticiper leur brutal impact fiscal à la sortie
- Retirer tout le capital en une seule année sans tenir compte de votre TMI
- Ignorer la composition exacte de votre PER (versements déduits/non déduits, épargne salariale, etc.)
- Transférer un contrat article 83 dans un PER sans avoir besoin d’une sortie en capital
L’astuce ? Tenez un tableau récapitulatif de vos versements par origine pour savoir exactement d’où vient votre épargne. Cela vous permettra ensuite d’élaborer un scénario fiscal optimal.
Derniers conseils pratiques pour optimiser votre sortie
Avant de sortir votre PER en capital, voici quelques bonnes pratiques à garder en tête :
- Simulez votre fiscalité en amont (vous pouvez consulter un conseiller fiscal ou utiliser des simulateurs en ligne)
- Échelonnez vos retraits sur plusieurs années si nécessaire pour rester dans une tranche d’imposition modeste
- Exploitez les compartiments non imposables en priorité (versements non déduits, intéressement, participation)
- Anticipez votre besoin de liquidité pour ne retirer que ce qui est utile à court terme
- Pensez au couple : deux PER, deux TMI, deux stratégies fiscales possibles
Astuce bonus : si vous êtes à la retraite mais encore faiblement imposé, c’est souvent le moment idéal pour sortir votre capital PER. Après quelques années, avec d’autres revenus qui s’ajoutent, l’opportunité fiscale peut disparaître.
Vous l’aurez compris : la fiscalité d’un PER en sortie de capital n’est pas une fatalité, mais une mécanique à maîtriser. Prenez le temps d’analyser vos options, et n’hésitez pas à planifier avec un professionnel si besoin. Votre retraite mérite qu’on s’y attarde… en capital !